Religions

 

Vers la fin de notre voyage, nos deux guides ont essayé de nous parler des principales "religions" qui imprègnent depuis longtemps le Vietnam : le confucianisme, le taôisme et le bouddhisme.

 

Ces trois religions sont issues des enseignements de personnages - Confucius, Lao Tseu et Bouddha - qui ont vécu à peu près à la même époque, vers le 5ème siècle avant JC, les uns en Chine, le dernier en Inde.

 

Le confucianisme : pour Confucius, le Ciel est l'expression divine de la raison, comme la religion de l'époque en Chine le croyait déjà ; le confucianisme est une morale sociale établissant les règles d'une vie correcte ; la voie (tao), c'est d'agir en suivant les cinq vertus : la bonté, la droiture, la bienséance, la sagesse et la loyauté.

 

Le taoïsme : pour Lao Tseu, il faut revenir à la nature ; la voie, c'est le premier principe, c'est la Mère Universelle ; il y a une dualité des contraires, le yin et le yang, l'un ne va pas sans l'autre ; le Moi est inaccessible par la raison mais accessible par la mystique du tao ; la morale est contemplative et prône le non-agir.

 

Le bouddhisme : au moment où naît Siddhârta Gautama, l'Inde est brahmaniste et parcourue par des gourous ambulants dont la doctrine est basée sur la connaissance droite, la conduite droite, la vue droite, qui sont censées ouvrir la voie à la délivrance de l'âme et au cycle des réincarnations.

Pour Bouddha, on peut supprimer la douleur en supprimant le désir et atteindre le Nirvana par la compassion et la sagesse, qui impliquent une morale, un comportement dans la vie.
On distingue le bouddhisme du petit véhicule ou la Voie des Anciens (Vietnam du Sud, Cambodge, Laos, Thaïlande, Birmanie, Inde du Sud) : on pratique selon la lettre, il y a l'idée d'une délivrance plus individualiste ; dans la pagode on trouve une entrée et une statue de Bouddha, les bonzes mendient pour vivre.

et le bouddhisme du grand véhicule (Chine, Japon et Vietnam du Nord), on pratique selon l’esprit, il y a l'idée d'une délivrance pour tous, dans la pagode on trouve trois entrées et plusieurs statues dont celle de Bouddha, les bonzes ne mendient pas, ils reçoivent des dons des fidèles.

Le bouddhisme du grand véhicule donne lieu à d'autres  pratiques : le bouddhisme zen, mélange de bouddhisme et de taôisme et le bouddhisme tantrique, inspiré de l'hindouisme (ésotérisme).

 

En dehors des trois religions, on trouve encore vivace l'animisme, anciennes croyances dans des esprits et des génies.

 

Nos guides nous ont donné des chiffres sur les pratiquants des différentes religions :

Bouddhistes : 10 M, Catholiques : 6 M, Protestants : 3 M,  Caodaïstes : 2,5 M, 

et Musulmans ; Il y aurait 80 % d'athées, pour lesquels la religion se résume à l'autel pour les ancêtres à la maison !

 

On se dit qu’il faudrait au retour lire un livre sur la religion au Vietnam : les gens ont intégré l'animisme, le confucianisme, le taôisme et le bouddhisme, comme en Chine d'ailleurs, qui a occupé le pays pendant les mille premières années de notre ère.
Il y a, nous dit-on, un syncrétisme de ces religions qui sont considérées comme complémentaires alors même qu'elles sont différentes ; c'est pour ça qu'on a du mal à s'y retrouver, habitués que nous sommes dans nos pays à des religions différentes et bien distinctes.

Il y a des temples chinois avec leurs déesses, des pagodes avec des statues de Bouddha et de Shiva, d’autres avec des déesses de la fécondité ou qui commémorent un roi ou des personnages importants, les autels des ancêtres, des génies tutélaires, les préceptes de Confucius ou de Lao-Tseu, les symboles omniprésents. Pour bien illustrer notre perplexité, il y a l’exemple étonnant pour nous du Génie du Foyer décrit sur un site Internet : 

 

Tous les 23ème jour du décembre lunaire, les Vietnamiens fêtent le génie du Foyer appelé Táo Quân ou plus familièrement Ông Táo en vietnamien. Cet événement si important se fait en famille et est un signe de l’achèvement de l’année actuelle.

 

Ông Táo, considéré comme un comptable, un surveillant ou  un génie tutélaire de la famille, partira au Ciel dans la nuit du 23ème jour du Décembre lunaire sur une carpe, en vue de faire un rapport de la vie de la famille à l’Empereur de Jade en précisant les mérites de chaque membre. Il retournera au foyer au moment du Réveillon et accueillera la nouvelle année avec tous les membres de la famille.
Croyant que le rapport de Ông Táo peut avoir des répercussions positives ou négatives sur la famille dans la nouvelle année, on prépare toujours de bonnes offrandes parmi lesquelles la carpe est indispensable pour reconduire Ông Táo au ciel et on lui prie d'apporter plus de bons points que de mauvais à l’Empereur.
Cette fête vient à l’origine d’une histoire touchante entre deux hommes et une femme, dont il existe plusieurs versions. On raconte qu’un couple se sépara et que la femme se remaria avec un autre homme et vécut assez heureuse. Un jour, un mendiant arriva chez elle et elle reconnut que c'était son ancien mari. Très émue de sa situation, elle lui donna beaucoup de plats à manger. Le mari revint alors à la maison. Ayant peur du malentendu, elle cacha son premier mari dans un grand tas de paille. Son mari, voulant préparer de la fumure pour ses champs, brûla le tas de paille. La femme se jeta dans le feu pour sauver son ancien mari et le nouveau, ne comprenant pas la raison de ce geste, s’y lança aussi pour la sauver. Tous les trois moururent dans le feu. Le Dieu, très remué par ces sacrifices, les transforma en génies surveillant les faits du foyer, pour que tous les trois vivent ensemble, l’un à côté de l’autre. C’est pourquoi, dans la cuisine de chaque famille, les marmites reposent toujours sur un trépied en pierres ou briques ou en fer. On dit que c’est la matérialisation de trois personnes pauvres – les trois Génies du Foyer. 
Les Vietnamiens croient que Ông Táo vole au Ciel sur une carpe. Dans certaines légendes vietnamiennes, la carpe se transforme en dragon lors d’un passage particulier entre la Terre et le Ciel.
Alors, dans la Fête de Táo Quân, on prépare toujours les trois carpes vivantes pour les génies. Les carpes rouges sont de nos jours les plus choisies car la couleur rouge représente la chance ainsi que le bonheur.

Les offrandes comprennent normalement trois carpes mises dans un bol, trois costumes en papier y compris vêtements, chapeaux et bottes, des fruits, des fleurs et des papiers votifs. Certaines personnes préparent encore du riz bien cuit, des plats délicieux, le Banh Chung – gâteau de riz gluant traditionnel.

Après le culte, on allume les papiers votifs et libère les carpes dans un étang, un lac ou une rivière non loin de la famille. Voilà comment finalement les Génies s’envolent au ciel sur les carpes en transportant aussi des papiers votifs de la famille à l’Empereur. 

Selon la région, on ajoute encore d’autres offrandes tels qu'un cheval avec harnais en papier ou un papier avec l’image du tigre ou du cheval. Le cheval aide Táo Quân à arriver rapidement au Ciel et le Tigre garde la maison pendant que les génies du foyer sont absents. Si l'on fait un tour dans les rues de Hanoï pendant ce temps, on trouve sans difficulté les carpes rouges mises dans un grand bassin ou dans les sacs en plastique pleins d’eau.